Stéphane Hessel, 93 ans : Indigné ! Et moi?

Pour Stéphane Hessel, le « motif de base de la Résistance, c’était l’indignation. » L’homme de 93 ans appelle à une « insurrection pacifique ». Son ouvrage Indignez-Vous, sorti en 2010 est un succès international en librairie. Mais moi qui ai assisté à un colloque où il était l’invité d’honneur: et si je ne voulais pas le suivre?

Tandis que je me réveille auprès de deux boulets que je prenais, le soir encore, pour deux canons : je ressens comme un mauvais présage. Quittant l’hôtel de passe où ne passait pas que des touristes innocents, je refile mes deux poufs à un vieil homme libidineux qui souhaitait s’y vautrer allégrement ; et je découvre, avec effroi, qu’il neige à Monaco. Moi qui pensais y réchapper sur la Côte-d’Azur, je me sens rattrapé par la réalité. Une réalité plus que jamais glaciale, attribuant même à Michel Houellebecq un peu de chaleur : il neige en hiver. Stupéfait et blasé- voilà qui est un bon enchaînement, après avoir évoqué Houellebecq !-, je m’approche d’un distributeur automatique où je tente de recharger mon portable. Mais, les lois de la physique sont telles qu’en essayant de les dépasser, d’en faire abstraction, ce sont elles qui me dépassent : ma carte demeure aussi muette que Carla Bruni- je vous laisse imaginer la scène : elle qui a été refusée dans The Artist parce qu’elle ne parlait pas assez fort ! Rouspétant contre cette injustice, pleurant autant de désespoir que les fans de ma tête de turc américaine préférée, Justin Bieber, s’apercevant de ce qu’ils écoutent, je m’indigne !

Oui, aussi remonté que les seins d’une bimbo siliconée, j’ai envie de tout péter, de tout casser, de baiser avec n’importe qui, n’importe où et n’importe quand. Sachant qu’elle soit noire, blanche, jaune ; brune, rousse, blonde ; jeune, moche ou vieille, je l’accepterai dans mes draps rouges, lui octroyant le droit de jouer avec ma faucille ou mon marteau ; et je n’oublierai pas de lui rappeler que l’altruisme est de gauche : qu’ainsi, plus elle sera généreuse en tour de poitrine ; et plus, mon entre-jambe le sera avec elle. Que n’ayant pas peur du ridicule- car, il est toujours ridicule d’avoir peur- je n’hésiterai pas, à défaut de lui tendre les bras, de lui tendre le poing, en lui criant : « viens me rejoindre, camarade ! » Ce sera beau, ce sera chouette : et ça plaisait déjà à mon esprit de bobo adolescent.

Je cherche donc, dans un journal local, l’annonce rêvée; puis, je tombe sur un colloque organisé par une association de sympathisants socialistes. Moi qui ne connaissais pas de mots en –oque (excepté, le terme de loque apparenté à mon meilleur ami), j’étais persuadé d’y apprendre pleins de trucs sympathiques…

… et je décide de m’y rendre !

Pénétrant dans les locaux, attendant pour déboucher le pinard – et ma braguette- je me prépare à retrouver les sixties. Peut-être aurais-je dû préciser que j’entendais par sixties son ambiance et non pas les participants ?  La moyenne d’âge ne dépassait pas celle de l’intervenant du jour, le plus gaga de tous les papys : Stéphane Hessel, 93 ans.

Stéphane Hessel, dont le seul cri de colère provient du fait que son sonotone grésille ; Stéphane Hessel, qui peut nous raconter, comme s’il y était, la première rébellion… parce qu’il y était ; Stéphane Hessel, qui engrange autant de lecteurs que le nombre des années- c’est-à-dire, trop !-, vient nous décrypter son dernier ouvrage. Le contenu peut se résumer à trois pages, et devrait s’intituler « Indigne de vous ». Parce que, lorsque l’on a côtoyé les grands de ce monde, on ne perd pas son temps à écrire pour les pauvres. Pour cette coiffeuse ménopausée de cinquante ans qui a été assez idiote pour enfanter trois gosses- tous admirateurs de Britney Spears- ; pour cet ouvrier, ayant confiance en son patron, alors que, s’il l’avait vu magouiller avec la holding chinoise voulant le licencier, il confierait plus sa confiance à Michel, le costaud qui aspire à lui casser les jambes ; pour ce clochard qui a décoché un toit facile d’accès et mobile, un toit qui cartonne puisqu’il est entièrement fait de carton.

Stéphane Hessel, je l’affirme, a d’autres activités : des télés à rencontrer, des journalistes aux jambes aussi maigres que les plats des Restos du cœur à charmer, des jeunes crétins excédés- en particulier, par leur bêtise- à convaincre. Dans tous les cas, des livres à vendre pour quitter sa baraque et lâcher ce pays avant que ce soit lui qui lâche ! C’est en tout cas ce que j’ai ressenti lors de ma rencontre avec super-gâteux Hessel.

Voilà, ma vie est peut-être insignifiante ; mais, elle m’intéresse plus que la vôtre, M. Hessel.

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