Les biopics traditionnels suivent un grand homme, ou un héros méconnu au destin hors-normes. Les frères Cohen ne font rien comme tout le monde avec Inside Llewyn Davis. Bienvenue dans la vie du plus looser des folkmen du Greenwich Village.
Llewyn Davis a le nom de Miles mais n’en a pas le talent… Il arpente les rues du Village, de bar en bar, pour vivre – plutôt survivre – en jouant quelques morceaux pour des cachets misérables. Souvent, il travaille seulement au chapeau. Il dort chez l’habitant, des amis, chanteurs pour la plupart, mais avec qui ont, eux, davantage de succès. Il en meurt de jalousie. Ce qui le rend à la fois hautain et distant alors que tout le monde lui ouvre les bras. Tous sauf Jean (Carey Mulligan), la voix féminine des morceaux de Jim (Justin Timberlake) avec qui il entretient une relation d’amour / haine difficile. Personnage antipathique, les frères Cohen ne le rendent pas moins attachant. Attachant parce que ces travers sont humains: ce n’est pas un monstre, juste « un looser un peu connard » selon les mots de Jean.
Heureusement, malgré l’idée de base de ce personnage qui rate tout ce qu’il entreprend, les réalisateurs ne nous servent pas une comédie potache, mais un vrai drame consistant. Un raté parmi tant d’autres, éclipsé par des showmen plus talentueux ou plus chanceux comme Bob Dylan qui fait une apparition comme un écho à la toute dernière scène de Llewyn. Un mec doué mais sans génie, mal managé par une petite maison de disque, qui se retrouve avec un carton d’invendus qu’il traîne comme une malédiction. Il traînera sa poisse jusqu’à Chicago, dans un voyage ubuesque, pour rencontrer l’un des plus importants imprésarios. Voyage hanté par un vieux jazzman incontinent et méprisant, un repris de justice et un matou attendrissant dont Llewyn n’arrive pas à se débarrasser, et le fera bien malgré lui.
Joël et Ethan nous offrent un bon moment, peut être pas inoubliable, à l’image de son protagoniste principal, mais réellement agréable. Comme une bonne vieille chanson folk.